Dimanche 18 Décembre 2011
CLAP DE FIN
Pour éviter qu’une seconde dépression ne nous rattrape, le commandant a poussé les feux cette nuit pour mettre ses passagers à l’abri. Sans doute une sage décision. Résultat, avec les horaires perturbés depuis les Shetland du Sud, nous avons presque douze heures d’avance à l’entrée du canal de Beagle. Et il va falloir patienter avant notre accostage prévu à 05h00 la nuit prochaine à Ushuaia. Un mal pour un bien, cela nous permet de naviguer à petite vitesse dans le fameux canal en vue des côtes chiliennes ou argentines, dont on distingue tous les détails.
Terre ! L’île chilienne de Nueva marque l’entrée du canal de Beagle. Soulagement pour certains ou fin du voyage trop proche pour d’autres |
En clair, ça sent la fin. Egoïstement, je vois arriver avec appréhension le moment du débarquement sur le quai d’Ushuaia. Je redoute ce moment incertain où je ne suis plus en bateau et où je ne suis pas encore revenu à la vie « civile ». Le voyage aurait bien pu continuer, je me sentais bien à bord et il n’était pas nécessaire que cela s’arrête si vite.
Je sais que beaucoup de passagers sont loin de partager ce point de vue, ceux pour qui le retour du Drake a semblé plus long que l’éternité. Le coup de vent a perturbé beaucoup de choses, empêchant nos excursions à terre de vendredi. Nous sommes donc à bord depuis jeudi en fin d’après-midi, et les moins familiers des choses de la mer ont hâte de se dégourdir les jambes…
La carte du parcours diffusée sur l’écran des cabines |
Déjà faire un bilan de ces deux semaines inédites ? Pas facile !
Un voyage hors normes, bien sûr ! Hors normes par les paysages, hors normes par la faune, hors normes par la situation météorologique. Une voyageuse à bord à résumé : « Ce que nous voyons n’existe nulle part !», tout est dit.
Ce voyage n’a rien eu de commun avec ce que nous avions imaginé avant de partir, grâce aux récits ou photos consultables sur Internet, ou aux reportages.
Les grands regrets :
· Le chenal Lemaire sans visibilité alors que nous savions que c’était « le » site grandiose le plus photographié de la région…
· Ne pas avoir vu de cétacés (ou bien trop peu)
Largement compensés par de grands moments :
· Le boulevard des glaciers sur le canal de Beagle
· Le débarquement sur l’île Horn et la vision du Cap Horn au moment du coup de sirène du FRAM
· L’île Deception et les formes fantomatiques de Whalers Bay sous les grains de neige
· Le tour du volcan de Stancomb Cove et les panoramas en noir et blanc
· La marche dans la neige fraîche à Damoy Point
· La progression du FRAM dans le pack en face de Petermann Island
· La balade en PCB au milieu des glaçons et icebergs au sud du chenal Lemaire
· Le chenal Errera encombré d’icebergs bleus
· Les manchotières de Cuverville
· Le coup de vent d’anthologie au sud de Livingston Island et la route suivie par le FRAM pour y faire face
Rien ne s’est déroulé comme prévu, et pourtant l’émotion a toujours été au rendez-vous. L’Antarctique ne nous a pas montré son côté le plus riant. Et pourtant, comment ne pas déjà songer à y revenir ?
C’était nos impressions du Grand Sud. J’ai tenu cette chronique à chaud, au fil de l’eau. Peut-être manquait-elle de précision quant à la description de la faune, la localisation géographique ou les références historiques que je n’ai pas eu le temps de peaufiner à bord. Je me suis vite rendu compte de la difficulté de décrire correctement les paysages que nous observions ou les situations que nous vivions et je n’ai pas pris le temps d’une relecture approfondie pour améliorer le texte.
Ce blog n’est pas la vérité absolue, il traduit juste ce que nous avons vu et ressenti. D’autres voyageurs auraient sans doute écrit différemment. J’ai voulu conserver l’émotion plutôt que de privilégier la littérature, et j’ai voulu garder du temps pour le voyage plus que pour l’écriture. Je pense que je conserverai ce blog tel quel.
Les côtes argentines depuis le canal de Beagle |
Je n’ai pas lu le blog rédigé en anglais par deux éminents membres de « l’expedition team » (un ornithologue et un biologiste-parasitologue), parce que ce blog n’était pas diffusé en totalité sur les écrans du bord et que les connexions internet sont d’une lenteur et d’un débit dont on a perdu l’habitude (et pourtant, quel miracle !). Il n’y donc pas plagiat, ni copier-coller de ma part. Il serait peut-être intéressant de comparer les deux blogs pour voir les similitudes ou les différences d’interprétation ou de ressenti sur les mêmes événements. Mais la lecture des deux blogs devrait certainement donner une vision complète de ce voyage hors des sentiers battus.
A lire, la suite de nos aventures à Buenos Aires dans deux jours…
La liste de vos "grands moments" me met les larmes aux yeux. Je suis allée là bas et j'ai eu la chance de voir le chenal Lemaire sous son meilleur jour et l'Antarctique sous le soleil et une mer transparente et lisse. Mais ce que vous avez vu, je ne l'ai pas vu, et la façon dont vous le racontez donne beaucoup de regrets (et surtout beaucoup d'envie). Je meurs d'envie d'y retourner, mais j'avais la crainte que ça ne soit pas aussi "parfait" que la première fois. Avec votre récit, je n'ai plus de crainte. Ça sera différent sans doute, mais ça sera parfait quand même, même avec les regrets, même si il y a des moments durs, ça sera forcément fort.
RépondreSupprimerJ'ai lu en parallèle votre récit et le blog du Fram. Ils se complètent très bien en effet. Ça a été un plaisir de vous suivre dans votre périple.
bravo pour cette expédition, j'attends avec impatience les photos Bisous à vs 2 RDV ds 2 jours je serais là. VB (profitez au maximum de vos derniers jours)
RépondreSupprimerMerci beaucoup pour le partage de vos émotions ! Vos photos comme vos lignes nous les transmettent bien et effectivement, même dans les bourrasques ou sous la neige, la lumière des hautes latitudes est vraiment magnifique. je vais mettre un lien vers votre blog.
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