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A TRAVERS LE PACIFIQUE : DE L’ILE DE PAQUES A VALPARAISO

Du Mercredi 07 au Mardi 13 Novembre 2018

En résumé : Notre cadre de vie pendant six jours !


A 15h00, l'île de Pâques disparait lentement, absorbée par le sillage du bateau. Le Boréal met maintenant le cap vers l'est et fait route directe vers Valparaiso au Chili, soit six journées complètes de mer pour parcourir 2 000 milles nautiques (3 700 km). 


80 personnes sont restées à bord et 6 nouveaux passagers ont embarqué pour cette traversée : des purs et durs, des bouffeurs de milles, assoiffés d'eau de mer, avides du grand large et d'horizon infini, prêts à en découdre avec le Pacifique… ou plus simplement, prêts à profiter du temps qui passe !


Ponant appelle cela "Voyage en Mer".  C'est un parcours de liaison entre deux continents, l'Océanie et l'Amérique du Sud à travers l'immense océan Pacifique sans escale possible. C'est donc un convoyage plutôt qu'une croisière classique. De ce fait, le bateau est au tiers de sa capacité et tout le rythme de la vie à bord devient plus fluide, encore plus détendu, moins formel. Ainsi, le pot d'accueil du Commandant envers les six nouveaux passagers s'est-il déroulé dans le cadre plus intimiste du salon du pont 3 plutôt qu'au théâtre.


Néanmoins, à quelques détails près, la qualité du service hôtelier et le programme facultatif des distractions sont équivalents à ce que nous avions vécu entre Tahiti et Pâques.


Durant six jours, on laisse le temps se dérouler de lui-même, sans autre contrainte d'importance que les horaires des repas… Tout le reste n'est qu'une question d'organisation personnelle où chacun vit à son propre rythme selon ses envies ou centres d'intérêts.



Six jours sans autre décor que la ligne d'horizon, cela peut sembler plus long que l'éternité. Pourtant, la déconnexion des passagers avec le temps qui passe s'est faite rapidement, en moins de deux jours. Et quand le Commandant annonce que nous sommes au premier tiers du parcours, la plupart d'entre nous ne sait déjà plus depuis quand nous avons quitté Pâques, ni combien de milles il reste à parcourir jusqu'à Valparaiso. Est-ce si important de le savoir ?


Les conditions météo se sont montrées particulièrement stables pour ce voyage au long cours : vent régulier de sud-sud-est force 4 à 5, une mer à peine agitée avec souvent une longue houle de sud, rien de bien méchant sauf un léger roulis compensé par les stabilisateurs ; les nuages nous ont souvent accompagnés jusqu'à la dernière matinée. Et comme notre route nous éloigne progressivement des tropiques, les températures de l'air et de l'eau perdent environ 1°C chaque jour.


A la passerelle, le lieutenant et l'élève-officier de quart continuent de reporter toutes les heures la position du Boréal sur la carte et surveillent l'horizon sans relâche, bien qu'il n'y ait aucun navire en vue. Le Pacifique Sud est un vaste désert maritime. Aucune grande route commerciale ne le traverse, alors on n'y croise aucun cargo, aucun chalutier non plus. 


C'est dans l'atmosphère silencieuse de la passerelle que se retrouvent les amoureux de la mer ou les rêveurs, toujours à fixer l'horizon qui n'en finit pas de reculer avec le bateau. A la passerelle ou à l'avant des ponts extérieurs, chacun reste libre de contempler, libre de vagabonder mentalement... La mer, ce n'est pas que de l'eau ! C'est aussi un paysage perpétuellement mouvant, des couleurs toujours changeantes, des situations dont on prend le temps de s'imprégner. Inlassable contemplation !


Chaque jour à 12h30, le Commandant s'exprime sur la radio du bord et fait le point sur la progression du Boréal qui navigue régulièrement à 14 nœuds (26 km/h) et parcourt en moyenne 336 milles nautiques quotidiennement (620 km). Il nous renseigne sur les conditions de navigation ou sur la météo des prochaines heures. C'est également lui qui détermine à l'avance les nuits où nous devrons décaler nos montres. Nous vivrons encore cela deux fois pour arriver à l'heure chilienne, UTC-3, soit quatre heures de retard par rapport à la France.


Imperturbablement, le Boréal trace son sillage dans le Pacifique Sud. Mais, l'avant-dernier jour à midi, la dernière carte marine est sortie de son tiroir et est posée sur la table de navigation. La côte de l'Amérique du Sud y est clairement dessinée et le cap tracé mène directement à Valparaiso, signifiant la fin prochaine de la croisière.


Et alors que l'on arrive presque au bout du voyage, je goûte un moment de calme au salon du pont 6. L'équipe de quart à la passerelle aperçoit en fin d'après-midi, le souffle d'une baleine et stoppe le bateau. L'observation des cétacés n'est pas une science exacte, c'est toujours fugitif et souvent frustrant. Je me contente de sortir sur le pont d'observation pour voir l'éventuel spectacle. Et contre toute attente, c'est une baleine à bosse et son baleineau qui reviennent vers le Boréal en sondant plusieurs fois. Les cétacés se frottent même le dos sous le bulbe d'étrave, passant d'un bord à l'autre pour la plus grande joie des passagers présents et le plus grand bonheur du Commandant qui rêvait de nous offrir ce spectacle. Nelly qui commençait à préparer les valises, n'a eu qu'à se pencher sur le balcon de la cabine pour prendre quelques clichés.


Depuis l’île de Pâques, chaque journée s’est déroulée ainsi, apparemment semblable à la précédente et pourtant toujours différente, sans que jamais l'ennui et la lassitude n'apparaissent. Même au bout de six jours ! Alors, comme le crépuscule ne va plus tarder, il reste juste le temps de s’offrir un dernier moment de détente à l’arrière du pont 3. Demain, nous verrons l’Amérique !

A suivre...

2 commentaires:

  1. C'est vraiment toujours un plaisir de te lire quand tu racontes la mer!

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  2. Je viens de lire en entier ton compte-rendu depuis l'embarquement à Papeete jusqu'à votre atterrissage à Rome ! Passionnant , remarquablement bien écrit avec des instants d'émotions pertinents (,Mururoa, Rikitea, Pitcairn,Anakena) et très bien documenté , j'ai vraiment refait le voyage en y retrouvant avec grand plaisir tout ce qui m'a aussi "enchanté" ; BRAVO pour tes qualités littéraires .( Stupéfait de découvrir que vous avez survolé Le Boréal en cale sèche à Valparaiso du haut de votre ascension au-dessus des Andes et que tu avais ta caméra à porté de main! incroyable ! Avec Amitié et avec de si bons et beaux souvenirs partagés
    Jo

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