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DJUPIVOGUR, OU LES BRUMES D'ISLANDE

 
Lundi 02 Juin 2014

 


07h00, le FRAM jette l'ancre à Djupivogur, au large d'une côte basse et rocheuse qui vue de l'avant du pont 5 pourrait ressembler à certains paysages de Bretagne Nord. Une succession de pointes et un semis de roches empêchent le FRAM d'aller plus en avant.

De l'arrière du bateau la vue est bien différente, de longues falaises noires dominent de larges plaines, et plus en arrière-plan les montagnes sont faiblement enneigées.

Le MS FRAM au mouillage devant Djupivogur

A part quelques petits nuages accrochés aux lointains sommets, la matinée s'annonce radieuse. Nous sommes en escale ici une grande partie de la journée et comptons en profiter pour faire un peu de tourisme pédestre autour du village.

 

Après le débarquement en PCB, nous commençons donc notre randonnée vers l'attraction majeure de Djupivogur, un ensemble de 34 énormes œufs en pierre polie, baptisé "Eggin i Gleidivik" (les œufs de la Baie Heureuse). Ces 34 œufs tous différents correspondent à 34 sortes d'oiseaux présents sur l'ile, et respectent la forme et l'échelle.


Djupivogur - Les œufs de la Baie Heureuse,
le dernier rayon de soleil de la journée - Dommage !

Cette visite à peine terminée nous avons été rapidement surpris par l'arrivée de petits bancs de brume masquant de temps à autre un paysage devenant de plus en plus incertain. A priori, un joli point de vue domine le village et offre de belles vues sur la côte, mais le temps d'y arriver, tout avait disparu…

Vue générale de Djupivogur

Retour à bord en PCB, le FRAM est bien caché derrière la brume épaisse, n'apparaissant qu'au tout dernier moment, tel un vaisseau fantôme… Les GPS à bord de ces engins de débarquement ont bien aidé les pilotes.
 
A 17h00, c'est un brouillard dense qui tombe, cernant le FRAM juste au moment de l'appareillage. De l'avant, on ne voit pas clairement l'arrière du bateau. Cela va durer deux heures. Le FRAM navigue dans l'un des coins les plus mal famés d'Islande, (côte rectiligne et basse, roches éparses, etc, un vrai cimetière à bateaux !). Pas rassurant ! Heureusement, la technologie est là pour se situer sur la carte !

Au bout de deux heures, cette brume épaisse s'effiloche progressivement, laissant d'abord entrevoir des petits bouts de ciel, puis la surface de la mer, pour enfin disparaitre définitivement. Nous sommes sauvés !
 
Dans la soirée, les nuages cachent les hauts sommets de l'énorme glacier Vatnajökull. Dans la lumière qui descend, nous pouvons voir dans le lointain plusieurs langues glaciaires, typiques des paysages de la côte sud. Une autre facette de l'Islande.

 

 
Le quart d'heure culturel

Liens entre France et Islande (2/3)

Plus que la littérature, ce sont surtout les activités maritimes qui ont lié les deux pays.

Déjà, en 1198, un bateau islandais aurait débarqué et vendu de la laine dans le port de Rouen (ce qui ne serait à priori pas impossible, le point commun entre l'Islande et la Normandie étant les invasions Vikings). Rouen est d'ailleurs la seule ville de France ayant une traduction purement islandaise : Rúðuborg, qui est l'adaptation par les Vikings du nom médiéval de la ville.

En 1616, les premiers "pêcheurs d'Islande" embarquent de Dunkerque. A partir de cette date, les campagnes de pêche vont se développer progressivement depuis les côtes de Flandre, Normandie et surtout Bretagne, devenant essentielles pour l'économie de ces régions.

Les pêcheurs d'Islande appartiennent depuis longtemps à l'Histoire, tant en Islande qu'en France. L'âge d'or de la pêche s'est développé entre 1850 et 1935, surtout grâce aux Paimpolais qui allaient "à Islande" traquer la morue en armant une impressionnante flottille de goélettes. Ces pêcheurs étaient avant tout des ruraux qui trouvaient là le moyen d'échapper à la misère, payant au passage un lourd tribut à la mer glacée et impitoyable, qui s'ajoutait aux cadences de travail inhumaines et aux pénibles conditions de vie à bord. Au cours de cette période, les bancs d’Islande virent disparaître environ 400 navires et 4.000 pêcheurs.

Mais pour des raisons médicales ou d'intendance, il arrivait que les équipages de ces goélettes relâchent dans les ports ou fjords de l'est ou du sud du pays où ils étaient en général, bien accueillis. Les Paimpolais apportaient une touche d'"exotisme" à la population locale de l'époque qui vivait repliée sur elle-même dans ces régions reculées d'Islande.

Des milliers de marins français ont pris leurs habitudes dans certains fjords, s'y sont rassemblés le temps d'une escale pour réparer, échanger, commercer, se soigner. A la fin du XIXème, les Français ont installé à Faskrudsfjordur, dans l'est, une infirmerie, puis une chapelle et enfin, un hôpital en 1903. La suite est d'une logique implacable… Après l’hôpital, c'est le cimetière. Un carré d'une quarantaine de tombes de marins français existe toujours à la sortie du village.

Au fil du temps, Faskrudsfjordur est devenu le "Village Français", et l'est resté même si les marins ne l'ont plus fréquenté après 1930. Les plaques de rues sont toutes écrites dans les deux langues, le drapeau tricolore flotte au-dessus du petit cimetière et l'hôpital a fait l'objet d'une réhabilitation que la crise financière a sérieusement ralenti. (Tous les détails sur cet hôpital : ici). Cette réhabilitation a été achevée début juin 2014, et le vieil hôpital s'est transformé en hôtel. C'est mieux que de rester à l'abandon. Un petit musée consacré à la vie quotidienne des pêcheurs en Islande est en cours d'achèvement, de même que la chapelle qui n'attend plus que la pose de bancs et la consécration de l'autel pour reprendre du service.

Par ailleurs, une petite stèle en mémoire de 88 marins français tous disparus le 6 mars 1873 au cours du naufrage simultané de 12 goélettes et provoqué par un ouragan, a été érigée dans le petit cimetière entourant l'église de Stafafell, près de Höfn. Une autre stèle avec une citation tirée de "Pêcheur d'Islande", a également été érigée dans le vieux cimetière de Holavallagardur à Reykjavik, en hommage à plusieurs marins français qui y reposent.


L'Islande et la France est donc une vieille histoire !

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