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AKULLEQ : MARS EN AOÛT

JEUDI 27 AOÛT 2015 - Jour 4 - De ILULISSAT à AKULLEQ - (Groenland)

Après l'appareillage d'Ilulissat, le Soléal a contourné l'île Disko par le nord et ce matin le bateau fait le tour de la vaste presqu'île de Qaarsut en la laissant à tribord.
 
Dès le début de matinée, la météo continue de nous favoriser, vent nul et ciel lumineux sans nuage, seule la température nous rappelle où nous sommes.
 
05h30, le Soléal navigue vers l'est, c'est l'embrasement total du ciel et cela dure longtemps. Vers l'arrière, c'est le rose qui domine. Impossible de se lasser d'un tel festival de couleurs. Il faut savoir se lever tôt pour mériter cela.
 
Petit matin au Groenland
 
Encore beaucoup d'icebergs sur la route, énormes et de formes diverses : cubiques, ronds, plats, pointus, creux, en forme d'arche, tous aussi volumineux les uns que les autres et surtout, tous plus dangereux les uns que les autres. Ce que l'on voit au-dessus de l'eau n'est rien à côté de ce qu'il y a en dessous.
 
 
 
A cette heure, l'ambiance est calme à la passerelle ; calme mais attentive. Il y a en permanence trois personnes de quart : un lieutenant breveté de la Marine Marchande, un jeune élève-officier qui complète à bord sa formation prodiguée par l'ENSM (Ecole Nationale Supérieure Maritime, ex Hydro) et un marin philippin qui surveille l'horizon en permanence derrière ses jumelles lorsque le bateau est en pilotage automatique. Cela n'empêche pas le lieutenant et l'élève de scruter également la mer. Et dans la zone où nous naviguons cette veille est d'autant plus attentive que l'horizon est largement encombré par des gros icebergs bien sûr, mais surtout par une multitude de growlers beaucoup plus sournois ; il s'agit de petits blocs de glace dont les plus plats émergent à peine. Ils sont souvent difficiles à repérer et, malgré leur taille relativement modeste, ils n'en sont que plus dangereux.
 
 
Bien sûr, les officiers de quart ont à leur disposition plusieurs écrans radars réglés à des échelles différentes. La lecture de ces écrans n'est pas évidente au premier abord mais avec un peu d'habitude on y décèle beaucoup d'indices extérieurs quelle que soit la météo : bateaux, grains de pluie, avions à haute altitude et même les plus petits des growlers flottant à la surface de l'eau. Mais la surveillance et l'attention restent essentielles.
 
 
09h20, Le Soléal jette l'ancre à Akulleq, dans un étroit passage entre deux îles de la baie d'Ummannaq, face à un site très minéral digne de la planète Mars : une haute colline ocre jaune ou orange, couleurs plutôt déconcertantes au cœur de l'austère Groenland et rendues encore plus vives sous le franc soleil.
 
Les passagers ont rendez-vous à l'arrière du pont 3 pour une ultime vérification des gilets de sauvetage et le pointage des cartes individuelles avant de descendre au pont inférieur, la "marina" pour embarquer sur les Zodiac™ avec l'aide efficace de marins qui assurent la sécurité.
 
Nous atterrissons sur une minuscule plage de sable ocre où nous attendent les guides d'expédition, autrement appelés "naturalistes". Eux, portent une parka jaune très visible et sont armés de carabines pour le cas où un ours polaire deviendrait trop menaçant. Rassurant ! Les naturalistes sont là pour baliser l'itinéraire et surtout apporter aux passagers toutes les informations nécessaires à la bonne compréhension du site.
 
Akulleq : Planète Mars ou Islande ?
Nous grimpons aussitôt par une trace étroite taillée dans une roche très friable qui se désagrège rapidement sous nos pas. Cela monte très fort dès le début de la rando et la progression est rendue difficile à cause du terrain instable de pierres et de sable grossier.
 
Dans l'air froid chacun monte à son rythme jusqu'à un replat d'où nous avons une jolie vue sur les alentours : falaises, sommets encadrant un bras de mer où de gros icebergs semblent échoués et en arrière plan, la calotte polaire.
 
Dans le moindre repli du terrain, profitant d'une faible couche d'humus, des lichens, mousses ou saxifrages tapissent le sol. Les arbres locaux, des saules arctiques, avec leurs branches rampantes culminent à une dizaine de centimètres de hauteur. C'est déjà l'automne et leurs feuilles minuscules commencent à rougir. Dans ces régions difficiles, la maigre végétation n'a que peu de temps pour pousser et profite du moindre abri et du jour permanent de l'été pour emmagasiner un peu de chaleur afin de croître aussi rapidement que possible.
 

Le mouillage d'Akulleq
Le paysage, l'atmosphère cristalline, le silence se prêtent naturellement à la contemplation. Une telle escale est toujours trop courte… Il faut redescendre encore plus prudemment qu'en montant.
 
Nous rejoignons le bord vers 12h00. Le Soléal quitte Akulleq alors que nous n'avons pas terminé de déjeuner. Nous naviguons dans le fjord d'Ummannaq largement encombré d'icebergs volumineux ; là encore, des monstres aux formes improbables qu'il vaut mieux savoir éviter !
 
 
Il y a à bord un pilote des glaces québécois Raymond J. qui, comme nous, a embarqué à Kangerlussuaq. Il n'interviendra officiellement qu'à partir du Canada, mais cela ne l'empêche pas de faire part de son expérience pour conseiller le lieutenant de quart quant à la route à suivre à travers les champs d'icebergs que nous traversons. Il est pilote dans le port de Montréal, mais a passé la plus grande partie de sa carrière maritime dans tout l'Arctique Canadien. La glace, il connait et cet après-midi son avis est bien utile pour louvoyer entre les obstacles.
 

 
Plutôt que de naviguer sur la route directe, le Commandant a décidé de contourner par l'est et le nord l'île Upernivik (rien à voir avec le village d'Upernavik), séparée du continent groenlandais par le chenal d'Inukavsait, étroit et sinueux. Le paysage vaut vraiment le détour.
 
 
Carte électronique : Route à suivre dans le chenal d'Inukavsait
pour contourner l'ile Upernivik
Le Soléal navigue entre de hautes montagnes aux sommets découpés en pointes acérées. A travers d'étroites vallées, plusieurs langues glaciaires dévalent des pentes escarpées et tentent de rejoindre la mer. En bas des pentes, on observe clairement les moraines entrainées par la glace avant qu'elle ne recule. Un vrai cours de géologie à ciel ouvert !



2 commentaires:

  1. Forestier Jean-Claude.27 septembre 2015 à 10:16

    Inutile de préciser qu'il y a la passion derrière les mots ; voilà un voyage dont nous redirons sans cesse qu'il est unique parce qu’il touche au cœur de l'Histoire et à ce que la nature a de plus authentique.
    Esthétisme, couleurs, photos, cartes, commentaires, tout y est. Très beau travail !
    Jean-Claude.

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  2. En 2007, j'avais beaucoup apprécié mon excursion au « red desert » à une heure de vedette d'Uummannaq. N'as-tu pas essayé de soulever une pierre… nettement plus lourde que ce à quoi on s'attend en la voyant… en 2007, il était question de carrière - mine pour exploiter les riches minerais du secteur. Effectivement, le contraste entre les ocres du sol et les icebergs au loin est magnifique. ma balade en 2007 à http://hurtigruten.toilapol.net/groenland/j4.html

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