05h15, à la
passerelle. Le beau temps qui prévalait jusqu'alors aurait-il disparu ? L'aube
n'a pas aujourd'hui la splendeur des précédentes. Les nuages bas couvrent les
sommets et la côte est voilée par une légère bruine. Le vent est faible de
l'arrière mais la température extérieure n'est que de 4°C et celle de la mer de
2,4°. Autant de signes qui font prendre conscience des hautes latitudes dans
lesquelles nous naviguons.
Hameau de Savissivik |
Nous sommes
bientôt en vue de Savissivik, un village ou plutôt un modeste hameau d'une
soixantaine d'âmes au fin fond de la baie de Melville, pour ne pas dire aux
confins du monde habité... Il n'y a guère que la base aérienne U.S. de Thulé et
le village de Qaanaaq (600 hab.), qui soient encore plus au nord.
Ce début de matinée
est un peu particulier, du moins pour nous. Le Soléal jette l'ancre devant
Savissivik, l'escale la plus septentrionale de notre croisière… Et pas qu'un
peu ! Nous battons ainsi notre record personnel de latitude : 76°00' Nord
(pulvérisant largement notre passage au cap Nord en Norvège en 2009 à seulement
71°10'N).
Je sais, cela ne
sert à rien ! Comme tous les records d'ailleurs, qui n'ont jamais changé la
marche du Monde… C'est juste pour nous une satisfaction personnelle. Ainsi,
nous balisons les limites cardinales de nos connaissances géographiques.
76° Nord, ce
n'est tout de même pas rien ! Alors pour finir de se situer, ce matin nous ne
sommes plus qu'à 1.555 km du Pôle Nord. Seul, le nord du Spitzberg est encore
plus haut en latitude : 80°33' N. Peut-être l'objet d'un autre voyage ? Plus
tard, peut-être !
A cause de la
faible hauteur d'eau, le Soléal est mouillé à une large distance du rivage. Un
haut fond qui relie les îles Bushnan et Savissivik au continent est le piège
naturel de tous les icebergs issus de la calotte polaire toute proche. Un vrai
cimetière pour des icebergs si volumineux qu'ils ne peuvent gagner le large
avant d'avoir suffisamment fondu et diminué leur tirant d'eau. Ils vont rester
ici des mois en attendant que les vagues les rongent, les déséquilibrent, les
morcellent.
La calotte polaire, fabrique d'icebergs en continu |
Une longue
balade en Zodiac™ est prévue pour s'approcher des icebergs (mais pas trop !).
Donc ce matin, équipement vestimentaire complet, couche isolante en dessous,
couche imperméable au-dessus pour contrer les effets du froid et du vent pendant
une heure trente.
A bord des canots, les naturalistes qui nous guideront à travers le cimetière d'icebergs |
A bord du Zodiac™,
notre horizon parait barré par un haut mur irrégulier. Nous suivons un parcours
labyrinthique entre des géants de glace qui, vus du ras de l'eau, n'en
paraissent que plus menaçants. La nature a sculpté des blocs, des pointes, des
ondulations, des arches éphémères. Cela peut être très massif ou très élégant,
aucun de ces icebergs ne se ressemble, ils sont tous fascinants.
Le ciel plombé
et la mer lisse comme du mercure mettent en valeur tous les détails. Avec le
gris environnant, les formes et les couleurs se détachent mieux que sous le
soleil éblouissant qui masque les teintes subtiles de certaines de ces
sculptures.
Inventaire non
exhaustif de la galerie des glaces :
Clichés garantis sans retouches |
La glace bleue est plus compacte que la blanche, elle est sans bulles d'air et filtre la lumière différemment |
Radio pulmonaire ? Non, glace compacte ! |
Retour à bord à
11h00, frigorifiés. Une bonne soupe ou un café nous attendent au salon du pont
3 pour nous revigorer. Nous avons choisi le café.
12h10,
appareillage de Savissivik. Une heure plus tard, le Soléal navigue par le
travers du cap York au profil caractéristique. C'est un gigantesque coin enfoncé
dans la mer de Baffin qui ferme la baie de Melville à l'ouest et qui marque
l'entrée du détroit de Nares. Au-delà, ça devient compliqué ; au-delà, c'est la
glace qui décide.
En navigant au large du cap York |
Nous n'avons pas
fini de doubler le cap York que nous passons à proximité de ce monstre qui ne
compte pas moins de 3 arches. Il est gigantesque, pas sûr que le Soléal fasse
le poids à côté.
Le cap York,
c'est la fin de la partie groenlandaise de cette croisière qui a magnifiquement
débuté. Maintenant, route au sud-ouest pour traverser la mer de Baffin. Cap
vers Pond Inlet, tout au nord de l'île Baffin. Un autre voyage commence vers le
Nunavut, vaste territoire au nord du Canada.
23h30, cap vers le Nunavut, quelque part en mer de Baffin |
Ce temps gris et calme va si bien à la glace... Bien mieux je trouve qu'un grand ciel bleu. C'est magnifique!
RépondreSupprimerJe garde un très bon souvenir de mes 2 passages au cap York, notamment lors du second sous un ciel couvert… Les icebergs étaient magnifiques avec cette lumière comme lors de ton passage.
RépondreSupprimerbelle balade en zodiac,avec des icebergs et des couleurs que j'aime.
RépondreSupprimerSuper beau ! Des sculptures de glace naturelles ! Grandiose ! Et ces couleurs ! Des paysages que vous avez eu la chance de découvrir !
RépondreSupprimerMagnifique balade en zodiac parmi ces superbes icebergs.
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