SOLEIL, BRUME, BANQUISE

VENDREDI 04 SEPTEMBRE 2015 - Jour 12 - EN MER - (Nunavut)

 

00h01, avec le demi-tour d'hier soir, nous sommes quasiment revenus en face de la baie de Conningham où nous avions vu les ours hier matin. Tout ça pour ça ! Les glaces, tout comme la mer dictent leurs lois, même aux paquebots. Rien n'est donc écrit d'avance en Arctique.

 

Début de matinée, le Soléal navigue au sud de l'île du Prince de Galles, très à l'écart de la route directe, vers la prochaine escale. Beau temps, belle mer ! La météo est d'une stabilité étonnante. Les quelques bancs de nuages laissent la place à de larges trouées de ciel bleu.

 

Les glaces dictent leurs lois mais notre Commandant est tenace. Avec Raymond, le pilote québécois, il a repéré sur la carte des glaces une zone de banquise disloquée près des îles Gateshead, à la sortie du chenal de Mac Clintock. A l'examen du document, il s'agirait d'une banquise de l'année, dont la position ne serait pas gênante pour la suite du voyage. De plus, cette banquise serait suffisamment étendue pour satisfaire la curiosité des passagers que nous sommes. Voilà ce qui justifie l'important changement de cap du début de matinée.

 

08h30, grand soleil sur l'aileron de passerelle. Très loin vers l'avant du bateau, une ligne mince barre tout l'horizon. La banquise est fidèle au rendez-vous. Il s'agit d'une longue zone mais relativement étroite que le Soléal longe au ralenti. Un ours qui nous observait s'enfuit au dernier moment.

 

Banquise !

La glace est fractionnée en milliers de blocs informes. Leur base, rongée par la mer, prend une jolie teinte turquoise et souvent au milieu de ces blocs une mare de fonte devient également turquoise. Selon l'éclairage, en comparaison de la glace qui réfléchit beaucoup de lumière, la mer parait très sombre, rendant le contraste encore plus important.

 

10h30, venu de loin, un vaste banc de brume rattrape le Soléal qui ralentit encore puis stoppe complètement en lisière du champ de glace. Le staff se réunit en urgence et décide d'une sortie en Zodiac™ dans la banquise. Waouh !

 

A travers le voile de brume, curieux reflet du soleil dans la mer

 

La brume enveloppe le bateau, on ne distingue plus grand-chose sauf un étrange phénomène lumineux qui va durer une bonne dizaine de minutes. (Et au passage, je dédie les photos qui suivent à Paul K., qui sera sûrement très intéressé).

 

Formation d'un arc blanc provoqué par la brume

 

 

Il s'agit d'un arc-en-ciel… sans ciel, appelé plus normalement "arc blanc". Celui-ci est provoqué par la décomposition de la lumière à travers de très fines gouttelettes d'eau contenues dans le brouillard et ne peut se produire que si le soleil est à moins de 40 degrés au-dessus de l'horizon. Tout le monde est subjugué, équipage et passagers, par la vision de cet arc inhabituel.

 

Début de la balade à travers les glaces

Nous embarquons sur les canots pour un long slalom au gré des trouées d'eau libre entre les morceaux de banquise. Le paysage évolue au fur et à mesure du déplacement de la brume qui se déchire ou se reforme en quelques minutes. Nous passons de la grisaille au franc soleil, du terne à l'éclatant, du fantomatique au réel. Rien ne dure jamais bien longtemps.

 

Les Zodiac™ suivent un parcours aléatoire, se croisent ou se doublent en contournant les obstacles sur une mer lisse comme un miroir où tout se reflète, même les nuages.

 

Notre balade dure près d'une heure au ras de l'eau, au ras de la glace. Et quand vient le moment de rejoindre le Soléal, le passage s'est refermé alors qu'il était encore libre quelques minutes auparavant… En poussant un peu, une brèche finit par s'ouvrir et nous libère. Sauvés !

 

Navigation entre brouillard et soleil,
un véritable enchantement

 

 

 

14h00, le Soléal remet en route. Nous sommes en mer pour la journée et le rythme à bord s'en ressent. Les passagers passent en mode croisière pour l'après-midi.

 

Nous assistons à une conférence sur "Les cétacés de l'Arctique" menée par Jean-Pierre, notre expert ès mammifères marins. Il connait tout de ces animaux qu'il a étudiés de près et en a fait des photos, des films, des livres, des articles dans les revues spécialisées. Il a sur le sujet une vision décalée et parfois surprenante puisqu'il a aussi chassé la baleine au Japon ou été dresseur de dauphins et d'orques dans un marinarium… Ses avis éclairés ne vont jamais dans le sens des idées reçues.

 

En toute fin d'après-midi, "récap" des naturalistes et présentation des activités du lendemain. C'est vite emballé puisque aujourd'hui et demain sont deux journées passées en mer !

 

Et cela nous mène directement à l'heure de l'apéritif au pont 3…

 

21h30, Nelly a réussi à ce que quatre naturalistes se joignent à elle pour faire avancer le puzzle…