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ANTARCTIQUE, ANTARCTIQUE

Mardi 13 Décembre 2011

ANTARCTIQUE, ANTARCTIQUE

07h00, entrée du chenal Neumeyer, un passage magnifique parait-il, mais ce matin, c’est vent et neige. On devine plus qu’on ne voit. Nous ne risquons pas d’oublier où nous sommes. Un vrai temps de la région…

Ce que l’on voit de mieux, c’est la glace de mer qui se forme en minces galettes et que fend l’étrave du bateau. Nous croisons quelques petits icebergs aux formes et contours indéfinis. Lors d’une accalmie, on imagine les formes incertaines des îles couvertes d’une copieuse épaisseur de neige.  Difficile de s’attarder trop longtemps sur le pont ou les coursives tant le vent glacial mord le visage.
Chenal de Neumayer

Ce matin, notre groupe a le privilège d’être le premier à débarquer sur l’île Wienke à Damoy Point. La visibilité est réduite, la neige vole, plus qu’elle ne tombe, en petits flocons serrés aiguisés comme des lames de rasoir. Il est prévu de visiter une ancienne station de recherche britannique utilisée jusqu’en 1993. S’y rendre est une autre histoire. Il faut marcher contre les bourrasques dans la neige fraîche qui bleuit sous chacun de nos pas. Au moindre écart, on s’enfonce jusqu’au mollet et il n’est pas rare d’être déséquilibré et même de tomber en s’enfonçant dans la neige. L’équilibre est d’autant plus difficile à conserver que les repères visuels disparaissent, tout est uniformément blanc gris, rien pour accrocher le regard… L’impression de marcher dans le vide. Epuisant !

A 200 mètres de là, dans de telles conditions la station de recherche que nous devons visiter paraît inaccessible. En fait, une petite cabane en bois. Tout ça pour ça ! Parvenus au but, nous pénétrons dans la cabane, tout est resté dans son jus : les boîtes de conserves sur les étagères, le réchaud et le four à pétrole, les livres, même un jeu de Monopoly réalisé sur place à l’époque, les bannettes des anciens occupants. Emouvant ! Et le (relatif) mauvais temps d’aujourd’hui donne la mesure de la précarité des conditions de vie dans ces petites bases.

Raid dans la neige fraîche pour rejoindre la cabane de Damoy Point.
En réalité, juste 200 m à parcourir !

Sur notre parcours, deux petites rookeries de manchots papous. Comme nous, ils font le dos rond contre la neige et le vent. Quelques manchots s’enhardissent vers le rivage et plongent rapidement dans la mer. Nous avons hâte d’avoir des conditions plus favorables pour les observer.

C’est le moment de parler de « l’expedition team ». Si le terme expédition est un terme surévalué, nous n’en vivons pas moins un voyage ou une croisière hors normes dans des lieux peu conventionnels. Nous devons cela à une équipe de passionnés qui n’hésitent à mouiller la chemise (et pas que la chemise) pour nous faire partager leur intérêt pour la nature ou la science. Mais ce sont eux aussi qui en détachement précurseur, reconnaissent et balisent les cheminements, se gèlent à longueur de journée sur le terrain lors de nos allées et venues à terre. Jusqu’au « team leader », Anja, une jeune femme allemande blonde (qui partage avec le commandant de bord toute la responsabilité, la sécurité et la réussite des croisières), qui n’hésite pas à séjourner dans l’eau en cuissardes pour assister l’accostage des PCB sur les plages et aider les passagers à débarquer. Tous font preuve de rigueur et d’un grand professionnalisme et de sympathie pour que cela se passe bien. Cela vaut également pour les pilotes philippins des PCB qui passent leur journée à la barre de leur canot face au vent et aux embruns ; eux, ne sont pas en vacances !

En tout début d’après-midi, le FRAM se déplace de quelques milles vers Port Lockroy, escale incontournable de toute croisière en Antarctique. Damoy et Lockroy sont les noms de deux mécènes français qui avaient financés l’expédition du commandant Charcot en 1903/1905. En remerciement de leur générosité, Charcot leur avait dédié ces lieux. En attendant que le vent se calme, le FRAM fait des ronds dans l’eau pendant plus d’une heure.

Port Lockroy était une ancienne base britannique établie durant la seconde guerre mondiale, tombée en ruines, puis réhabilitée par une association anglaise de sauvegarde du patrimoine. Ce lieu est surtout connu pour la reconstitution à l’identique de cette base avec tout le matériel et objets d’époque. C’est très bien fait et dès l’entrée dans la cabane, on est dans l’ambiance de l’époque.

Pour faire vivre tout cela, des volontaires séjournent ici durant la saison estivale (sic), et font tourner une petite boutique de souvenirs et de timbres. C’est aussi à Port Locroy que se trouve la seule boîte à lettres officielle de tout l’Antarctique.

Imaginez Nelly lorsqu’elle a entendu le mot boutique ! Elle qui n’en avait plus vu depuis quatre jours, ça l’a rendu fiévreuse ! Elle a trépigné d’impatience, et pas de chance pour elle, elle a dû attendre tout l’après-midi, cette fois-ci nous étions dans le dernier groupe à débarquer en début de soirée !
Damoy Point - La première manchotière de Papous

Les manchots Papous ont également investi ces lieux. Ils sont partout à couver autour et sous les bâtiments de la base, visiblement peu effrayés par les visiteurs qui envahissent leur domaine. Nous avons eu le loisir de les observer.

Le vent a régné tout le temps de notre escale, donnant une mer courte et hachée. Au retour , nous avons été copieusement arrosés par les vagues qui explosaient violemment sur la coque du PCB.

Nous avons reçu notre baptême de l’Antarctique.

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