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ATTEINDRE L'ÎLE CHARCOT

                                                                                                                                              

Cette terre a été vue pour la première fois le 11 Janvier 1910 par J-B Charcot, et encore n'a-t-il aperçu que sa côte septentrionale depuis le nid-de-pie du Pourquoi Pas ? Ce fut une vision lointaine et fugitive, il n'a pu s'en approcher à moins de quarante milles à cause de conditions de banquise et de météo défavorables. Comme il pensait que ce qu'il voyait faisait partie du continent antarctique, il lui a donné le nom de Terre de Charcot en l'honneur de son père, médecin neurologue très réputé en son temps.

En dehors d'une partie montagneuse visible au nord, toute cette terre est ensevelie sous une épaisse calotte glaciaire et est ceinturée par une très large banquise côtière permanente qui en interdit pratiquement toute approche. Ce n'est qu'en 1929 qu'il a été prouvé que cette terre était en réalité détachée du continent et a ainsi été rebaptisée Île Charcot.

Profil de côte extrait du "Journal de la Deuxième Expédition au Pôle Sud" rédigé par J-B Charcot - (Source gallica.bnf.fr / BnF)

Mercredi 21 Décembre 2021 - Aujourd'hui, nous sommes aux abords de l'île Charcot en même temps que le début de l'été austral. C'est le jour le plus long de l'année, comme si cela avait un sens ici où il n'y a ni aube ni crépuscule. La navigation a été plutôt tranquille durant notre sommeil où nous avons été bercés par un léger roulis dû à la houle d'ouest. Depuis hier soir et la sortie de la baie Marguerite, le bateau a fait cap au sud-ouest à bonne vitesse sous un ciel bas et bien gris.

Icebergs tabulaires séparés de la calotte polaire de l'île Charcot


La côte nord de l'île Charcot
La zone montagneuse visible au nord de l'île se prolonge par une très vaste calotte polaire

Peu avant 09h00, le capitaine annonce par la radio interne que l'île Charcot est en vue à 30 milles à bâbord. Du fait de sa position, cette île a été observée par peu de marins jusqu'alors et l’excitation monte à bord après cette annonce. En effet, le profil sombre de la côte nord de l'île sort timidement de l'horizon, cerné par un alignement d'énormes icebergs tabulaires. Tout cela reste bien lointain, mais c'est sûr, nous avons aperçu l'île Charcot !

12h00, le Commandant Charcot pénètre dans le brash, sorte de bouillie mélangée de petits glaçons, qui devient de plus en plus dense et épaisse au fur et à mesure que nous progressons. Notre passage ne paraît pas perturber les nombreux phoques qui nous entourent. Ils n'ont que faire du bateau et poursuivent leur sieste sur les plus grosses plaques de glace. Nous croisons également pour la première fois, la route de deux manchots empereurs isolés, bien loin de leur colonie.

Le Commandant Charcot progresse maintenant et sans difficultés dans une zone de banquise disloquée beaucoup plus dense qui s'étend à perte de vue. A perte de vue ! Nous sommes au cœur du blanc, de l'infiniment blanc. Rien que du blanc, quel que soit le côté où l'on se tourne ! Tout se confond dans ce blanc sans réelle limite : le profil de la calotte glaciaire qui recouvre l'île, le front glaciaire qui n'est plus qu'une simple ligne floue, les icebergs tabulaires qui surnagent au-dessus l'horizon incertain, sous un ciel bas et ouaté.


Ces deux manchots empereurs isolés sont très loin de leur colonie d'origine

Quelles dimensions donner à tout cela où l'on ne perçoit plus ni distances ni relief ! Il n'y a rien de concret pour arrêter le regard. Sans but réellement visible, cela laisse l'impression étrange de naviguer dans un vide infini, où les seuls repères tangibles ne sont plus que les taches sombres des phoques posés sur la glace.

A cause de cette large et épaisse banquise qui ceinture l'île et l'impossibilité d'y accéder, aucun navire ne s'est jamais aventuré dans cette région avant le Commandant Charcot. Il y a, là encore, un grand blanc sur la carte marine. Notre Capitaine progresse avec prudence dans cette mer inconnue et son équipage, à l'aide de multiples sondeurs et de sonars spécifiques, cartographie les fonds marins parallèlement à la route suivie par le bateau. On est dans l'exploration pure.

Il y a eu une reconnaissance en hélico peu avant midi, puis une autre à 15h00 par le second-capitaine pour déterminer un futur point d'arrêt à la lisière de la banquise compacte. Le Commandant Charcot stoppe à 17h00 et l'équipe d'expédition débarque aussitôt sonder la glace autour du navire avant que les passagers ne puissent fouler la banquise une nouvelle fois.

La banquise côtière déborde largement le front glaciaire de l'île Charcot

 

Echelles de hauteur et de profondeur ! Perturbant !

18h30, plusieurs groupes constitués s'éloignent du bateau pour diverses randonnées en raquettes. Les petits hommes oranges donnent l'impression de marcher vers nulle part… et de rapetisser lentement avant d'être absorbés par l'immensité blanche du paysage. Curieuse contrée !

Deux phoques s'enhardissent et viennent faire une visite de courtoisie durant l'escale. Personne ne les a appelés, ils sont venus tout seuls ! Ils sont restés un long moment à se faire admirer près de l'étrave, puis continué leur chemin en passant sous l'échelle de coupée pour le plus grand bonheur des passagers présents.  

Deux phoques très curieux

Jusqu'où ces empereurs marcheront-ils ?

Début de soirée, retour de la balade. Le bar éphémère a été de nouveau installé sur la banquise. Mais ce soir, pas de bulles pétillantes, que du chocolat chaud ! Heureusement, quelques gouttes de crème de whiskey irlandais en ont dynamisé le goût ! A renouveler après chaque sortie hivernale !

Fin d'après-midi devant l'île Charcot

 

 

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